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Poésie
Marie Delvigne
Paru en juillet 2015 aux éditions Les Contemporains favoris, Collection Oeuvres complètes, 36 pages
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Marie Delvigne, La fille qui… © Editions Les Contemporains favoris, Collection Oeuvres complètes, 2015
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SI VOUS AIMEZ les puzzles et les jeux de construction, si vous aimez la littérature quand les mots se mettent à danser pour exorciser d’anciennes souffrances, si vous aimez la poésie expérimentale pourvu qu’elle se mêle d’ouvrir de nouvelles routes vers la compréhension intime de l’être, alors vous aimerez sans doute La fille qui… de Marie Delvigne.
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Photo : Marie Delvigne
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LE RÉSUMÉ
Fille du
post-trauma, la fille qui… é-cri(e)t pour rassembler un corps par la
vertu d’une langue scénographe, une écriture qui se déploie voire se
décri(e)t elle-même en jeux d’hybridations. Comment un langage
constitue-t-il ou défait-il la réalité ? Comme le lombric, il absorbe la
terre et la restitue rythmiquement en petites traces digérées. La
bouche peut-elle avaler et restituer la réalité ? Cela paraît dans cette
écriture où se mêlent les cris et le silence. Si la fille qui… répète
son lamento c’est parce que le vide, pour elle, est bien trop
vertigineux. Traversée en écho par les douleurs du monde, la peau ici
est sanguine et douloureuse, et la cruauté « une idea d’écriture ».
Source : Les Contemporains favoris
L’AVIS DE LECTURES AU COEUR ♥️♥️♥️
Le corps, la
peau, le langage. L’être et le texte, éclatés, déchirés, en souffrance.
Les mots sont le miroir de l’âme et sur la page, «la fille qui…» se
croque, se cherche, se recroqueville, se dessine, floue, si floue,
désunie. Elle s’accroche aux mots qui fusent, qui claquent, qui éclatent
dans l’énoncé contraint des souvenirs. Elle se coule toute entière dans
l’écriture, elle se drape dans le texte comme si le tissu littéraire
devait lui servir de seconde peau. Frappée, humiliée, fracassée, la
fille qui écrit ne raconte pas : elle est-cri. Tout son être se
rassemble autour de l’expression poétique, façonnée, domptée, maîtrisée,
de la souffrance et des cris qui n’ont jamais pu être poussés.
Corpus à vif qui mime la dissolution de l’être, La fille qui … de Marie Delvigne maltraite
le style, disloque le langage pour approcher au plus près de la vérité
post-traumatique. Poésie expérimentale au carrefour de la littérature et
de la psychanalyse, ce recueil intense de trente-six pages joue sur la
déconstruction du verbe pour creuser les apparences et fouiller toutes
les couches du sens, de la plus évidente à la plus secrète. Jeux
d’esprit sur la phonétique des mots, lapsus, fautes d’orthographe
intentionnelles (« je me mort »), parenthèses, majuscules, abréviations,
caractères en italique, symboles mathématiques ponctuent, soulignent,
nourrissent et torturent le texte, le maintiennent en équilibre au bord
de l’anéantissement, de l’immersion dans les eaux mortelles de la page
blanche et du silence. Divisé en trois modules, dont la couleur
scientifique trahit le besoin de maîtriser l’horreur du traumatisme, La fille qui… pointe
le désir vital de la mue et la nécessité de changer de peau pour
renaître. Envisagée comme un moyen de trouver l’apaisement, l’écriture,
d’un journal, de lettres, d’un poème, avec des mots « en forme de
lombrics de poésie » doit permettre de fertiliser le passé et de le muer
en art. Une manière pour la fille qui « n’a plus la force de se battre
[contre, pour?] » de se réconcilier un peu avec elle-même.
Puissante,
incisive, tumultueuse, la poésie de Marie Delvigne brûle le coeur. Et
son cri longtemps résonne au plus profond de nous.
O.d’Harnois
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