vendredi 5 février 2016

extrait de bipôle

Fidelio


fidélité, fiabilité, loyauté, probité, honnêteté, musicalité, sérieux, profondeur, attachement, sincérité, droiture, vérité, mensonge, trahison, défection, inconstance, perfidie, vide.

Le monde me semble un puzzle désarticulé et je me demande pourquoi je ne peux faire preuve de constance dans ma relation aux autres. Il m’arrive d’entendre des voix et de percevoir des dizaines d’images à la fois. Comment rassembler le puzzle. La réalité quelle est-elle ? Où est ma fidélité ? Ce bras sur lequel je me dépose et qui soudain s’arrache et traverse la rue pour un autre sourire me rappelle les multiples séparations que j’ai vécues dans la vie.
Des voix qui s’élancent puis se taisent en s’éloignant.
Comme si les silences étaient a fortiori pleins d’amour et tant d’absence…..
- Je me marie dans un mois, dit l’amie.
- C’est une blague ?
- Non, c’est sérieux.
Ma chère amie s’écarte alors comme pour me signifier qu’elle a désormais un autre cœur à battre en neige.
Ces êtres qui partent, supporter de les voir s’éloigner. Ces êtres que je quitte parfois comme par inadvertance. A-t-elle existé ? A-t-il existé ? Les êtres qui m’environnent ne sont parfois que des nuages. Ont-ils seulement existé ou n’était-ce qu’une illusion de la brume ? Ces autres que je quitte pour les protéger de moi et disparaître en ne disant rien de ce qui m’assassine.
Elle est où ma fidélité et ma vie ? Faire de l’autre un être de souvenir. Le tenir bien au chaud, si ravissant, dans un coin de la mémoire Ne pas exister dans le sien. Ne pas exister dans sa vie, seulement y glisser et s’échapper. Ne pas aimer. Ne pas être attendrissant ni attendri. Et le silence. Tout ce qu’on ne dira pas par orgueil, par pudeur : un écho d’un monde réel qui vrille sans nous.
Et puis vieillir avec ces bribes, ces routes croisées, un moment de grâce : la vieille dame du Lot qui rentre déjà à la maison. Ses pieds ne dansent plus. Un pain dans son panier, une bouteille de lait et des glaïeuls jaunes et bleus qui embelliront les ombres errantes. Les murs de la cuisine qui ont perdu les échos d’antan, les cris d’enfants ; la voix de l’Autre et son odeur de tabac.
Si fragile, éparse, des bribes d’amour deviné, offert, épars, éparpillé… Juste quelques bribes …
Elle est où mon humanité si je dois cacher mes larmes, mes soupirs, mes rires, mes peurs et mes terreurs? Et l’attention de cet homme que j’ai aimé qui s’est usé de moi au fil du temps mais est resté, au cas où…. :
- Un œuf dur, ça te dit ? Une orange, oui?
Accepter ces silences pleins d’amour sans songer vraiment à les comprendre.
Mon silence est plein d’amour, oui.
J’ai retrouvé un bout de lettre que j’avais envoyée à Hervé après notre énième séparation. Elle était tachée de vin, je lui disais : Je dois te quitter parce que je ne sais plus qui je suis. Je ne me reconnais plus » .
Voilà une semaine qui s’est passée sans aucune nouvelle et l’automne approche. L’automne qui me fera dire qu’il y a plus d'un an, j’ai laissé ma langue fondre dans ta bouche. Un jour, je reviendrai vers toi, quand j’aurais vaincu tous mes monstres. Je ne sais pas quand, je suis si mal en ce moment. 
Vivre avec moi est un supplice...





2 commentaires:

  1. Silence dichotomique. Le silence est une partition sans son où pourtant il y a deux voix. La sienne et celle d'un autre. La première voix, la sienne c'est pourtant le premier Autre avec lequel il faut vivre. C'est bien celui-là qui nous fait défaut. L'enfer c'est l'autre en soi tant qu'on ne s'accepte pas divisé. Puis, j'arrête, la prose est belle, on y voit grandir dans l'ombre des rivières les grandes solitudes qui charrient les corps du passé. Puis quand même la lumière...qui grandit avec ses rayons d'argent. Merci pour cette belle lecture.

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